Le syndrome du "technicien de surface"

Publié le par Le Club Aita

Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? A la lecture de certains intitulés de profils de poste concoctés par l'ANPE, on peut se poser la question. Et si la formulation de ce type de document avait pour but d'opérer une première sélection ?

Parmi les horizons professionnels recherchés par les demandeurs d'emploi, celui d'ouvrier en secteur industriel figure en bonne place. Pas étonnant dès lors que chaque offre dans ce domaine suscite une avalanche de candidatures. Comment réaliser une première sélection dès la parution de l'offre en question ? Facile : en complexifiant à l'extrême l'intitulé du poste.

Soit donc une offre pour une formation qualifiante proposée par l'ANPE, destinée à être prolongée par un emploi.  Les compétences que les candidats doivent avoir acquises à l'issue de la formation sont libellées de la manière suivante : "Etre capable d'expliquer les principes technologiques du travail des viandes et des coproduits, et d'interpréter une fiche technique de production à l'aide de connaissances scientifiques et techniques simples." Ou encore : "Etre capable de maîtriser les opérations et les gestes d'un poste principal de travail, et de les adapter aux variations de production." Et plus loin : "Etre capable de mobiliser des connaissances mathématiques en vue de résoudre des problèmes simples de la vie sociale et professionnelle." Voilà quelques exemples d'items d'un référentiel qui en compte sept...

De quel emploi peut-il donc s'agir, pour nécessiter un savoir aussi savamment décrit et, osons le dire, quelque peu intimidant ? A l'image du "technicien du surface" substitué au balayeur, c'est ici d'un poste "d'ouvrier polyvalent du travail industriel des viandes" qu'il s'agit, c'est-à-dire, en termes vulgaires, ouvrier dans l'agro-alimentaire.

Difficile de comprendre en quoi ce type d'emploi nécessite de "mobiliser des connaissances mathématiques" destinées à "résoudre des problèmes simples de la vie sociale et professionnelle". A moins que cette phrase, aussi pompeuse soit-elle, n'ait pour unique fonction d'indiquer que les employés à ce poste doivent savoir faire preuve de bon sens...

La pénurie d'emplois dans le milieu industriel est telle qu'elle impose aux candidats un véritable parcours du combattant, avec pour façade et critère de tri l'adaptation à des tâches qui, du temps du plein emploi, étaient apprises sur le tas. Là, la simple lecture des qualifications requises suffit probablement à décourager un grand nombre de personnes, pourtant sans doute capables de s'acquitter très correctement du travail demandé. Mais c'est toujours ça de moins comme CV à éplucher...

Publié dans Analyses

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article
L
Pour répondre à Trentenaire, il s'agit ici dans l'exemple présent d'une offre de formation, et non d'emploi, dont le libellé a bel et bien été rédigé par l'ANPE, ou tout au moins l'organisme de formation agréé par elle.
Répondre
T
N'avez-vous jamais pensé que l'Anpe n'est qu'un intermédiaire et qu'elle diffuse les offres d'emploi rédigée par les employeurs?<br /> Les critères de sélection sont choisis par l'entreprise.<br />  <br />  
Répondre
G
Je ne suis pas completement de votre avis et cette attaque a un côté procés d'intention.Si les entreprises ordinaires exigent aujourd'hui de telles compétences sur des postes d'ouvrier de production c'est aussi que ces postes intégrent de plus en plus d'opérations de traçabilité, de contrôles qualité et de saisies logistiques qui nécessecitent un compréhension rapide de consignes, une capacité à gérer de manière autonome des aléas ainsi que l'utilisation d'équipements informatiques. Ceci est la conséquence de la productivité recherchée de l'heure travaillée française qui est une des plus élevée du monde, en réponse (entre autres) à la réduction du nombre annuel d'heures travaillées.
Répondre